Interview du groupe Les Mains Sales

Le 8 avril 2014, Radio Chez Watt est allé voir Les Mains Sales au Favela Chic. Concert Jazz / Hip-Hop super maîtrisé à l'occasion de la sortie de leur nouvel EP "Expansion" chez Back to Paradise Records.

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Les mains sales, 4 garçons pleins d'avenir bien entourés derrière les micros. Pour suivre correctement l'interview qui va suivre, petite pause trombi :

 

Chez Watt : Comme vous allez être très connus dans peu de temps, il faut vous entraîner à répondre aux questions classiques des interviews. La moitié des questions sera donc celles qu'on va vous poser ailleurs et l'autre moitié les questions de Chez Watt.

Antoine : Lol !
Seb : Si tu continues à dire "lol" je refuse la diffusion de cette interview, mec.

Chez Watt : Première question classique : comment s'est passé le concert de ce soir au Favela Chic ?

Seb : On n'avait pas vraiment assez de retour, mais j'ai eu de bons retours dans le public.

Chez Watt : De notre place c'était super en tout cas. La bière était un peu chère mais… ça ne doit pas empêcher le Favela Chic de nous réinviter, surtout. Seconde question : C'est pas gênant d'avoir 200 personnes en face de toi, la bière à la main, qui te regardent bosser ?

Alix : Ca dépend de leur réaction… Mais c'est plutôt motivant d'essayer de capter l'attention de tant de personnes.
Seb : C'est donnant-donnant !
Alix : Voilà, la vie c'est un échange, finalement…

Chez Watt : Voilà, ça y est ! Vous êtes prêts pour les réponses bateau aux questions bateau ! Autre question : Quelles sont vos influences ?

Leo : Je suis pas mal influencé par le rap américain new-yorkais…  Tout ce qui est Jay-Z, NaS, Common et dans les trucs plus récents, j'écoute du Kendrik (Lamar, ndr) mais plus pour le kiff, c'est pas franchement une de mes références.

 

Chez Watt : On vous a tous un peu stalké sur Facebook et en fouillant ton profil, Alix, on a vu que tu postais des vidéos de Jean-François Coppé au piano. Est ce que c'est un exemple pour toi ? Qu'est ce qu'il apporte aujourd'hui dans le paysage du jazz français ?

Alix : C'est complètement un exemple, oui. Je pense qu'il est assez caractéristique du jazz français, sans aucun doute ! (rires) Non, honnêtement, qu'est ce qu'il apporte ?… Je dirai… De l'humour.

 

 

Chez Watt : Et aujourd'hui, dans ce milieu du jazz français, qui est ce qui est sur le même créneau que vous ?

Léo : Il y a The Slime, mais ils ont beaucoup plus de parties électro et moins de rap que nous…
Seb : C'est pas pour être arrogant mais il y a assez peu de personnes qui ont notre approche aujourd'hui. On mélange jazz et rap mais harmoniquement ça se rapproche beaucoup plus du jazz que du Hip hop. On ne fait pas simplement tourner un beat, on ne joue pas simplement par dessus des boucles.

Chez Watt : C'est le batteur qui défend son taf qui dit ça, non ?

Seb : Haha, non c'est juste qu'il y'a une tendance en ce moment à faire du hip-hop en prenant des musiciens qui imitent la manière de faire d'un beatmaker, et du coup ça donne des choses beaucoup plus carrées que ce qu'on fait. Nous on part beaucoup plus dans tous les sens…
Alix : C'est un choix qu'on a fait, mais c'est autant un avantage qu'un inconvénient. Parce que c'est assez dur à définir aux yeux du public. Il y a des passages assez intellectuels et d'autres beaucoup moins…

 

Chez Watt : Est-ce que tu pourrais nous définir ces passages "moins intellectuels" ?

Antoine : Quand sur ma basse j'active la pédale d'octaver, on est tout de suite beaucoup moins intellectuels. Le côté couillu du groupe, c'est moi, soyons clairs ! (rires)

Chez Watt : Les mains sales, futur Robert Glasper français ?

Seb : Justement j'allais en parler ! A mon avis on est encore plus proches du jazz que lui.
Alix : La différence, c'est sans doute qu'il est plus intelligent, surtout…
Seb : Moui, disons que dans l'idée on se rapprocherait plus de Soweto Kinch mais ils sont encore plus extrêmes que nous, il y'a carrément des passages free…

 

Chez Watt : Mais petit à petit vous vous en éloignez de ce "jazz traditionnel", non ? On sent bien que vous allez vers des compositions plus accessibles avec le temps.

Alix : Oui c'est la grande question. Est ce une voie qu'on veut vraiment prendre… je ne sais pas, ça se fait tout seul.
Antoine : Beaucoup de compositions étaient instrumentales au départ. Léo est venu ensuite poser dessus et dans un sens, on a un peu gardé cette manière de fonctionner. Beaucoup de nos compos pourraient être jouées uniquement instrumentalement.

Chez Watt : Bon ben merci Léo, au revoir !

Seb : Non mais justement, aujourd'hui tout ce que l'on compose est totalement indissociable du chant !

Chez Watt : Alors justement on s'est un peu renseigné aussi sur toi, Léo. On a appris que tu jouais dans un autre groupe "Moster Morse", c'est du rock-dubstep-hip-hop. Les mains sales c'est Jazz hip-Hop. T'as donc balayé les trois quarts des styles musicaux. Est ce que t'envisages de te lancer ensuite dans le dark-musette-alternatif ?

Léo : Héhé, c'est clair qu'un jour je viendrai à d'autres styles ! Mon but c'est de sortir le rap des carcans dans lesquels il s'empêtre à l'heure actuelle avec des grosses prods, etc. Mon combat, à mon échelle, c'est de dire que le rap c'est pas uniquement ça et qu'il est possible d'en faire autrement, ailleurs.

 

Chez Watt : Attention question classique : vous serez où dans 10 ans ?

Seb : En cendres, dispersés sur la montagne. Pour que ce soit collectif il faudrait qu'on meure tous dans un accident d'avion.
Chez Watt : D'un point de vue purement marketing ce serait plus intéressant qu'il n'y ai qu'un seul d'entre vous qui meure, comme ça les autres seront plus exposés dans les médias. Donc décidez-vous, y'a plein de façon de tirer au sort, la courte-paille, etc.
Alix : Voilà, la gloire ou la mort, rien d'autre.

Chez Watt : Et il y a dix ans, vous étiez où ?

Léo : Y'a 10 ans j'étais au conservatoire classique… et j'ai vite arrêté !
Antoine : Moi je buvais mes premières bières en écoutant du blues en banlieue
Alix : Uniquement en banlieue, apparemment…
Seb : Moi j'écoutais de la vieille techno mainstream, j'avais même pas commencé la batterie, je faisais des percus classiques mais j'étais mauvais
Alix : Moi je gambadais dans les prairies non loin de Grenoble…

Chez Watt : Avec un piano sur le dos, ce qui est quand même assez exceptionnel, il faut le noter. Nouvelle question standard : Pourquoi ce nom, "Les mains sales" ?

 

Alix : Y'a deux explications mais… on va peut-être privilégier la version officielle. C'est un hommage à Jean-Paul Sartre.
Chez Watt : ha carrément !
Alix : Mais oui ! Tout le monde s'en étonne, je ne vois pas pourquoi ! C'est parce qu'il y a un rapeur dans le groupe qu'on ne peut pas connaître le théâtre ?
Chez Watt : ha mais t'as pas besoin de te justifier, on te croit quand tu nous dis que t'es allé au lycée.
Léo : Mais c'est très logique, en fin de compte. Les Mains Sales c'est une pièce et notre musique est un dialogue, y'a une correspondance évidente, je trouve.
Alix : Et puis Jean-Paul Sartre, grand amateur de jazz, utilisait un langage très travaillé, comme ce que nous essayons de faire dans notre musique.
Seb : Jean-Paul était très fan de rap, aussi.

Chez Watt : Et alors elles parlent de quoi ces chansons travaillées ?

Léo : De la vie… Au départ, je posais comme un instrument supplémentaire. J'essayais de voir ce que racontait la musique et je le retranscrivais avec des mots. Et puis petit à petit je me suis mis à raconter notre évolution, personnelle et dans le milieu de la musique…

Chez Watt : Donc vous racontez votre vie. L'extinction des baleines, vous vous en foutez totalement ?

Léo : Non non justement y'a une phrase dans notre dernier morceau… (rires) Plus sérieusement, le morceau "Les mains sales" parle un peu d'écologie si tu veux.

 

 

Chez Watt : On est soulagés. Mais pour ce qui est de votre carrière, quelque chose nous échappe, tout de même. Vous venez du jazz traditionnel, vous avez tourné au Sunset, vous pourriez continuer votre lancée en ne faisant que des clubs de jazz huppés, avec les bières à 10 balles et un public de 20 personnes. Au lieu de ça, vous vous obstinez à aller dans des endroits cools pour jouer devant des centaines de personnes. Pourquoi ?  

Léo : C'est le but. On veut démocratiser le jazz en y mettant du rap et faire évoluer le rap en y mettant du jazz. On est en mode EXPANSION.
Seb : Je pense surtout que les musiciens de jazz qui font des gigs devant 20 personnes rêvent eux aussi de faire des concerts devant des centaines de personnes…
Chez Watt : C'est bien, vous prenez un raccourci en allant vous frotter directement à la foule !
Léo : Oui mais on prend des risques. Parce que quand tu réserves une salle de 200 personnes et qu'elle est vide, et d'une t'as mal au coeur et de deux t'as mal au cul, parce que t'as un deal et qu'il faut le respecter. Mais s'il faut aller jouer dans des PMU, moi je veux bien !
Chez Watt : C'est bien de penser à votre public. Dans les PMU la bière n'est pas chère et les cacahuètes sont gratuites. Merci Léo.
Antoine : Et puis surtout le public peut suivre le match en même temps qu'on joue. Ca c'est confort. Regarde, ce soir y'avait PSG-Chelsea, les gens étaient emmerdés, ils devaient regarder sur leur smartphone, c'est sûr que c'est pas l'idéal (rires).

Chez Watt : Merci les Mains Sales. On va vous filer un coup de main pour la promotion de votre EP. Essayez d'imaginer les arguments pour convaincre Fip, Fun Radio, Chérie FM et Nostalgie de passer vos morceaux.

 

 

Merci Alix, Léo, Seb et Antoine d'avoir joué le jeu. À bientôt aux Disquaires (Paris 11), le 3 mai 2014 et bonne expansion pour la suite !

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